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Quand le rejet fait place à la curiosité

L'agrochimie semble mieux reconnue pour son utilité dans la chaîne de production alimentaire, tout comme les efforts du secteur pour améliorer les pratiques.

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C'était il y a un an, en novembre 2008, à l'Assemblée nationale : le collectif « Sauvons les fruits et légumes » sensibilisait élus et médias sur les risques que la disparition de solutions agrochimiques fait courir aux filières agricoles, fruits et légumes en tête. Les messages ont été largement relayés dans la presse grand public et des reportages de télévision ont montré des producteurs démunis, sans moyen de lutte contre divers pathogènes. Il semblait alors, tout à coup, que les méchants soient devenus les mouches du chou ou la moniliose de l'abricot, plutôt que les pesticides à qui on donnait presque le bon dieu sans confession. Quelques années plus tôt, des pamphlets contre les produits phytosanitaires avaient tout autant été médiatisés, écrits et diffusés sous la houlette du lobby antipesticides français, le MDRGF (Mouvement pour le droit et le respect des générations futures). Le livre « Pesticides : révélation sur un scandale français » tirait ainsi à boulets rouges sur toute la filière d'homologation et de production des phytos.

Un autre ouvrage, « Pesticides, le piège se referme », ainsi qu'un site internet et une vaste campagne de communication éponyme « Pesticides : non merci » formaient une véritable fronde antipesticides qui avait en son temps été largement reprise par les médias, à coup d'avis de scientifiques dont on ne soupçonnait même pas qu'ils puissent être acquis à la cause de ce mouvement. Plus récemment, le film et le livre de Marie-Monique Robin, « Le monde selon Monsanto » en a ont rajouté une couche et semé un peu plus le trouble dans la tête du grand public. Mais cette fois, de nouvelles voix indépendantes se sont élevées contre le « journalisme partisan ». De même, trois ans après les violentes attaques du MDRGF qui rendaient les insecticides entièrement responsables des phénomènes de dépopulation des ruches, le monde apicole et scientifique commence à stopper ses tirs d'artillerie lourde contre l'agrochimie (lire p. 14).

Moins d'agressivité et de violence

Le vent serait-il en train de tourner ? Les assauts seraient-ils devenus si violents par le passé qu'ils en deviendraient douteux ? « Nous ressentons moins d'agressivité à notre égard », confirme Claire Morin, responsable communication à l'UIPP (Union des industries de protection des plantes). Cette dernière reconnaît pourtant que « ça ne s'arrange pas beaucoup » du côté de l'image des phytos qui restent toujours très stigmatisés par le grand public, comme l'ensemble des produits chimiques d'ailleurs.

Mais le rejet semble plutôt faire place à la curiosité. Les temps changent et les gens ont envie de comprendre ce qui leur fait peur. Et puis, comme le dit Vincent Tardieu dans son livre « L'étrange silence des abeilles » : « Les crises ont du bon. » Celle de la disparition massive d'abeilles aura ainsi permis, entre autres, « d'inquiéter les agriculteurs sur leur gestion parfois déraisonnable de l'espace rural ». Faute de réelle portée médiatique, la pédagogie et les explications dans des face-à-face sont alors les meilleurs outils que développe la filière de protection des plantes pour faire évoluer les mentalités. Du coup, loin d'être bonne, l'image des produits phytosanitaires s'améliore très légèrement.

Démarches de progrès

« Il reste beaucoup de travail, car nous n'avons pas encore assez communiqué sur nos démarches de progrès et l'utilité de nos produits, mais on y travaille fortement », poursuit Claire Morin. Et sur ce terrain là, les firmes phytosanitaires sont effectivement devenues totalement parties prenantes.

Par leurs actions en faveur des bonnes pratiques phytosanitaires, les agrochimistes français font leur maximum, et investissent beaucoup d'argent, pour que la professionnalisation de leur métier et les pratiques durables soient mieux reconnues, au moins par leurs partenaires des filières (de l'aval !) et de la société civile (élus en tête). Evolution des formulations et des packagings, édition d'outils favorisant le meilleur positionnement des produits : OAD (outils d'aide à la décision), accompagnement des agriculteurs ou démonstration des bonnes pratiques, les initiatives ne manquent pas. Certaines firmes oeuvrent en leur nom propre, comme Syngenta qui ouvre ses fermes Agéris au grand public, ou BASF et sa démarche Eco acteurs destinée à mieux suivre – indicateurs à l'appui – les progrès des actions de la société. Mais la plupart se reposent sur leur interprofession. L'UIPP devient ainsi le garant de l'image des phytos auprès du grand public.

Par ailleurs, des actions périphériques participent aussi à redorer le blason de l'agrochimie hexagonale. C'est en effet, en France, qu'on recycle le mieux ses déchets phytos (lire ci-contre). Distributeurs et agriculteurs ont très vite bien joué le jeu. Huit ans après la mise en place de cette filière, plus de mille coopératives et négoces ont participé, en 2009, aux collectes des déchets des produits qu'ils distribuent. Résultat : plus des deux tiers des emballages vides de produits phytos seront collectés cette année ! D'autres secteurs d'activité en pâlissent de jalousie, qu'il s'agisse des produits pharmaceutiques, des produits chimiques des professionnels du bâtiment ou des produits ménagers.

D'autant plus que ce sont les producteurs, vendeurs et utilisateurs qui financent ensemble cette filière via leurs interprofessions. Et s'ils sont très impliqués dans la démarche, les agriculteurs ne déboursent rien pour la collecte (dans la mesure où le fabricant adhère à Adivalor). Ce sont également ces producteurs qui participent le plus à diminuer les quantités de déchets générées par l'utilisation des phytos. Et en plus des emballages et des produits périmés, des efforts sont désormais faits sur les effluents, sous couvert, cette fois, d'un cadre réglementaire.

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